La secrétaire d’État à la personne handicapée Julie Fernandez Fernandez a découvert hier à Tournai l’énergie et la créativité d’Espace Sourds.
À l’angle de la rue du Rempart et de la place Verte, Espace sourds (Eveil et soutien pédagogique, culturel et éducatif des sourds) est une ruche bourdonnant d’activités.
La surdité au quotidien
L’objectif de la matinée de mardi, c’était la présentation du nouveau service d’accompagnement familial lancé en septembre dernier. Beatrix Desclée, la présidente, et Caroline Heretynski, la coordinatrice, ont dit, en langue des signes et en français, comment un tel service pouvait compléter le travail des interprètes. C’est que «dans la vie d’un sourd ou du parent d’un enfant sourd, il existe, à n’en plus finir, des situations de communication compliquée. Exemples simples : le rendez-vous à déplacer, la réunion de parents à l’école…» Qui plus est tous les sourds ne maîtrisent pas le français écrit ou parlé, et certains ont aussi des difficultés avec la langue des signes.
«Le service propose donc, par un accompagnement familial, une évaluation des besoins et capacités, une identification des aides à mettre en oeuvre, la coordination des différents intervenants, une aide à l’insertion sociale…»
Les leçons béninoises
La présence de la secrétaire d’État a aussi été l’occasion de faire le tour des multiples actions menées par Espace Sourds. Retenons ses partenariats avec des structures similaires (Asunoes-CAEIS) installées au Bénin.
La collaboration va vraiment dans les deux sens. Car si de jeunes Béninois ont été invités à se former à la bande dessinée en Belgique, les Belges eux sont complètement admiratifs devant le modèle d’intégration des sourds développé à l’école bilingue de Porto-Novo. Enfants sourds et enfants entendants y sont élevés ensemble, un peu à la manière d’une école d’immersion. Du coup les sourds font des progrès que l’on n’observe dans aucune école dite spécialisée, et les entendants sous tous des interprètes potentiels. Une compagnie artistique a été montée dans le même esprit.
Avec Woopy et avec Dupuis
Woopy, héros de livres, cassettes et DVD adaptés aux jeunes sourds, a donc pris le chemin de l’ancien Dahomey pour le tome 7 de ses aventures. L’ensemble, élaboré en commun, sort ces jours-ci.
L’expérience pédagogique béninoise devrait faire l’objet d’un film documentaire d’ici 2010.
Sont également prévues des formations à la video à la fois à Tournai et au Benin de même qu’un festival Handiart au Bénin.
À propos de BD, et hors Woopy, Espace Sourds développe aussi avec CLAP (centre de langage audiovisuels et participatifs) et les Éditions Dupuis, la traduction en langue des signes de la collection «Punaise et Puceron». Quatre albums sont en ligne (www.punaise-puceron.com). Trois sont en attente et un huitième en préparation.
Des langues et des signes
Détail étonnant : au cours de ces exposés, il y avait deux traducteurs en langues des signes… et ils ne faisaient pas vraiment les mêmes gestes.
C’est que si la Belgique et le Bénin ont le français en commun, il se fait que pour des raisons historiques qui remontent à la fin de l’esclavage, c’est la langue des signes US qui s’est imposée dans ce qui fut pourtant par la suite une colonie française.
À chaque langue majeure correspond en effet une codification des signes. «Mais, précise Caroline Heretynski, des sourds entre eux captent très vite la langue de l’autre. C’est moins vrai pour des gens qui ont appris la langue des signes.»
La secrétaire d’État a quant à elle insisté sur les dimensions autonomisation et intégration de la politique qu’elle mène, ainsi que les moyens prévus dans la note de gouvernement. Indice de son implication : elle avait songé à faire traduire sa note de politique générale en langue des signes.
Source : http://www.actu24.be © 10 Décembre 2008 à Belgique